Relations complexes entre vitamine D et cancer du sein

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La vitamine D est essentielle car elle influe sur l’absorption du calcium par l’intestin et sur la minéralisation des os. Elle a deux origines : l’alimentation (notamment le foie de morue, les poissons gras, les œufs) et l’exposition au soleil. Les populations d’Europe, en particulier au Nord, souffrent généralement d’une carence. Des compléments alimentaires sont parfois prescrits, notamment pour éviter l’ostéoporose chez les femmes ménopausées.

Des études ont suggéré que la vitamine D pourrait avoir un rôle protecteur vis-à-vis du risque de cancer du sein. Cependant, les statistiques apportent des résultats controversés. Qu’en est-il vraiment ? Pour le savoir, nous avons étudié la relation entre la survenue du cancer du sein et la prise de complément en vitamine D chez plus de 57 400 femmes ménopausées. Au cours du suivi, 2 500 cas de cancer invasif du sein ont été comptabilisés. Nous avons observé que les femmes qui prenaient un complément de vitamine D avaient un risque diminué de 18 % de cancer du sein, mais seulement pendant la période de prise.

Le rôle du traitement hormonal de la ménopause (THM)…

L’histoire n’est pas simple car il semblerait que d’autres facteurs influencent cette relation. En effet, nous avons observé que la prise de complément en vitamine D était associée à une diminution de risque de 26 % chez les femmes prenant, ou ayant pris, un THM. En revanche, nous n’avons observé aucun lien chez celles n’ayant jamais pris de THM. Ces données suggèrent que la prise de complément en vitamine D pourrait réduire l’augmentation de risque de cancer du sein causée par la prise de THM et serait donc bénéfique aux femmes pour lesquelles un THM doit être prescrit (c’est-à-dire, selon les dernières recommandations, les femmes ayant des symptômes climactériques sévères : bouffées de chaleur et autres symptômes de la ménopause gênant leur vie quotidienne).

Et le rôle du poids

Le poids pourrait également influencer la relation entre prise de complément en vitamine D et risque de cancer du sein. Des études montrent que les personnes en surpoids sont particulièrement carencées en vitamine D. La vitamine D étant stockée dans les cellules graisseuses, les chercheurs pensent que la grande capacité de stockage chez les personnes obèses empêche la vitamine D de circuler normalement dans le sang. Nous avons donc, en plus du THM, pris en compte le facteur poids.

Les résultats sont surprenants. En effet, chez les femmes n’ayant jamais pris de THM, la prise de complément en vitamine D est associée à un risque accru de 51 % de cancer du sein chez les personnes minces ou ayant un poids normal, mais pas chez celles en surpoids pour lesquelles aucun lien n’a été mis en évidence. En revanche, chez les femmes ayant pris un THM, la prise d’un complément de vitamine D est liée à une réduction de risque de cancer du sein de l’ordre de 15 %, aussi bien chez les femmes de poids normal que chez celles en surpoids ou obèses.

Ces résultats suggèrent des liens complexes entre la prise de vitamine D et le risque de cancer du sein. La prise de complément en vitamine D pourrait bénéficier à certaines femmes, mais être délétère pour d’autres. Nos résultats suggèrent une plus grande prudence dans la prise de compléments de vitamine D notamment dans le contexte actuel de diminution de la prise de THM.

Pour en savoir plus :

Cadeau C, Fournier A, Mesrine S, Clavel-Chapelon F, Fagherazzi G, Boutron-Ruault MC. Interaction between current vitamin D supplementation and menopausal hormone therapy use on breast cancer risk: evidence from the E3N cohort. Am J Clin Nutr. 2015 Oct;102(4):966-73.

Cadeau C, Fournier A, Mesrine S, Clavel-Chapelon F, Fagherazzi G, Boutron-Ruault MC. Postmenopausal breast cancer risk and interactions between body mass index, menopausal hormone therapy use, and vitamin D supplementation: Evidence from the E3N cohort. Int J Cancer. 2016 Nov 15;139(10):2193-200.