L’influence de l’alimentation sur la carcinogenèse colorectale

Alimentation

 

On sait déjà le risque de cancer colorectal augmenté par la consommation de viande rouge et de charcuterie, mais qu’en est-il de l’interaction avec d’autres aliments ? Les chercheurs de l’équipe E3N ont fait le point sur différents régimes alimentaires.

De nombreuses substances nutritionnelles cancérigènes et anti-cancérigènes sont liées au risque de tumeur colorectale, qu’il s’agisse de cancer ou d’adénome. Mais l’influence des modèles alimentaires au cours de la séquence adénome-cancer est encore peu connue. Les consommations d’aliments ou de nutriments étant étroitement corrélées entre elles, il n’est pas toujours facile de déterminer précisément l’importance de chaque facteur.

Deux études E3N

Les chercheurs de l’équipe E3N se sont penchés sur quatre modèles alimentaires principaux pour réaliser deux études distinctes : l’une sur les facteurs de risque d’adénome, l’autre, de cancer colorectal.
Ils ont d’abord examiné les données de 4 804 femmes sans polype et 516 femmes ayant eu un adénome dont 175 étaient à haut risque (adénome d’une taille supérieure ou égale à 1 cm, ou à contingent villeux supérieur à 25 %, ou avec dysplasie de haut grade). Dans un second temps, 172 femmes ayant eu un cancer colorectal et 67 312 femmes indemnes de cancer ont été incluses dans l’étude.

Les quatre modèles alimentaires étudiés

Le premier modèle dit « sain » était caractérisé par une forte consommation de légumes crus et cuisinés, légumes secs, fruits, yaourts, fromage frais, céréales du petit-déjeuner, produits de la mer, œufs et huiles végétales, et par une faible consommation de confiseries.
Le second modèle nommé « occidental » était lié à la consommation de pommes de terre, pizza et tartes, sandwichs, légumes secs, bonbons, gâteaux, fromage, pain, riz, pâtes, charcuterie, œufs et beurre.
Le troisième modèle, appelé « buveur », était associé à la consommation de vin et d’autres boissons alcoolisées, au grignotage entre les repas, à une forte consommation de sandwichs, café, charcuterie, produits de la mer, ainsi qu’à une faible consommation de potage et de fruits.
Le quatrième modèle, dit « carné », était déterminé par une forte consommation de viande, pommes de terre, légumes secs, café, volaille, huiles végétales et margarine, et une faible consommation de thé, huile d’olive et céréales du petit-déjeuner.
L’effet de ces quatre modèles alimentaires sur le risque de tumeur colorectale a été examiné selon que les femmes adhéraient peu ou beaucoup à chaque modèle.

Des associations différentes selon les modèles alimentaires

En comparant à chaque fois les femmes adhérant le plus à un modèle à celles adhérant le moins, les données ont révélé un risque accru de cancer colorectal associé au modèle « carné », le risque relatif étant de 1,58. Un risque accru d’adénomes a également été observé chez les femmes ayant une alimentation caractéristique des modèles « occidental » et « buveur » (RR respectivement de 1,39 et 1,42).
Ces résultats sont compatibles avec un effet délétère sur la carcinogénèse colorectale des modèles alimentaires associés à un mode de vie occidental, c’est-à-dire riches en graisses, produits animaux et grignotages entre les repas, et faibles en produits d’origine végétale.

Les quelques différences observées entre les modèles alimentaires associés aux adénomes et ceux associés au cancer ne sont pas surprenants, car certaines formations cancéreuses peuvent ne pas résulter d’un adénome, et seule une proportion limitée de personnes avec adénome développera finalement un cancer.

Parmi les personnes ayant des habitudes alimentaires occidentales, celles ayant une forte consommation de viande peuvent être particulièrement à risque de développer un adénome colorectal avec transformation maligne. Ces observations peuvent aider à identifier des groupes à risque auxquels une stratégie de prévention peut être recommandée.

Pour en savoir plus :

Kesse E, Clavel-Chapelon F, Boutron-Ruault MC. Dietary Patterns and Risk of Colorectal Tumors: A Cohort of French Women of the National Education System (E3N). Am J Epidemiol. 2006; 164(11):1085-93.

Télécharger le communiqué de presse de l’Inserm.